Site Historique autour de la Musique Techno à Berlin
Love Parade
Le 1er juillet 1989, à 16 h, sur le côté nord de Wittenbergplatz, trois camionnettes commencent à diffuser de l'acid house. Une centaine de personnes dansent sur le Kurfürstendamm, devant les passants interloqués. Il pleut. La fête se termine devant le grand magasin KaDeWe, puis se prolonge dans le club mythique UFO. Une révolution est en marche.
Née de l’imagination de Matthias Roeingh alias Dr. Motte, inspiré par les raves illégales anglaises et par la possibilité constitutionnelle allemande de manifester librement, la Love Parade est pensée comme une marche pour la paix, la joie… et les crêpes (Friede, Freude, Eierkuchen). C’est une déclaration festive, un manifeste dansé porté par une nouvelle culture électronique.
De 150 à 1,5 million de ravers : l’ascension fulgurante (1989-1999)
Chaque année, la Love Parade prend de l’ampleur. De 150 personnes en 1989, elle attire 500 000 participants en 1995, au point de devoir quitter le Ku’damm pour rejoindre la Straße des 17. Juni, entre la Ernst-Reuter-Platz et la Porte de Brandebourg. En 1999, l’événement culmine avec 1,5 million de participants. Le monde entier a les yeux rivés sur Berlin.
La colonne de la Victoire (Siegessäule), au cœur du Tiergarten, devient l’emblème visuel de cette parade mondiale, où des ravers venus de tous les continents dansent sur des chars aux sons de Westbam, Marusha ou Carl Cox.
Une manifestation musicale, un acte politique
Loin d’être un simple défilé de DJ, la Love Parade porte une intention politique claire : celle d’unir les peuples autour de la musique, de promouvoir la paix et une culture de partage. Dès le début, les slogans en témoignent : The Future is Ours (1990), Peace on Earth (1995), We Are One Family (1996), Music is the Key (1999)...
Puis à partir de 1997, chaque édition s'accompagne d’un discours de clôture prononcé par Dr. Motte devant la Siegessäule, retransmis sur les radios locales (notamment Radio Fritz),différentes chaînes TV et synchronisé sur les chars. Ces discours rappellent le cœur du message : rassembler au-delà des frontières.,
Une économie parallèle, une culture totale
La Love Parade est aussi une usine à rêves et à souvenirs. Dès 1991, du merchandising (t-shirts, badges, CD, pins, canettes…) est proposé pour financer l’événement. À partir de 1996, des compilations officielles sortent sous le label Low Spirit Recordings, regroupant les hymnes et les tracks les plus marquants. Le slogan devient aussi un produit.
Les compilations lors de l'exposition Love Parade en 2019
Une organisation collective et visionnaire
Réduire la Love Parade à Dr. Motte serait oublier l’incroyable collectif qui l’a portée : Danielle de Picciotto, qui en imagina l’aspect visuel dès 1989 ; Westbam, co-créateur des premiers mix ; Sandra Molzahn et William Röttger pour la logistique et le label ; Jürgen Laarmann pour le graphisme ; Ralf Regitz pour le développement de la structure ; Miriam Scheffler, fonctionnaire à Charlottenburg, qui déposa la toute première déclaration de manifestation...
Chaque année, une armée d’anonymes et de passionnés, artistes, techniciens, stewards, s’implique dans l’organisation. La mode rave devient une signature : costumes colorés, boas, peintures corporelles, sifflets, sourires – un hommage autant au carnaval de Rio qu’au Christopher Street Day berlinois.
Le tournant des années 2000 : de l’utopie à la chute
En 2001, la justice allemande requalifie la Love Parade en événement commercial. Les coûts explosent. Le rêve vacille. Les labels se retirent, la critique de la marchandisation enfle. En 2003, la ville impose un périmètre, limite l’accès au parc du Tiergarten, et les participants dénoncent la perte de l’esprit originel.
Après deux années de pause (2004-2005), la parade revient en 2006 avec le slogan "Love is Back", financée par la chaîne de fitness McFit qui l'a rachetée … Mais l’esprit n’y est plus.
Dr. Motte lui-même choisit de ne plus y participer, préférant s’exprimer à la Fuckparade, contre la récupération commerciale du mouvement.
Nous ne parlerons pas ici de la période "Ruhr" qui n'a rien à voir avec Berlin, et l'esprit de la parade.
Un patrimoine techno à préserver
Aujourd’hui, la Love Parade est entrée dans l’histoire. Son héritage est vivant dans les clubs, les sons, les pratiques collectives et les valeurs techno. Ses parcours, de Wittenbergplatz à Adenauerplatz et celui de la Straße des 17. Juni, sont des hauts lieux symboliques pour quiconque s'intéresse à la culture électronique.
Une nouvelle aventure depuis perpétue son esprit... la parade Rave The Planet sur ce second samedi de Juillet, jour traditionnel de la Love Parade !
Char Friede,Freude,Eierkuchen CSD 2019 devant
la Kaiser-Wilhelm-Gedächtniskirche sur le tracé de la Love Parade de 1989 à 1995
Vous avez aimé cet article ? Alors vous allez adorer aller plus loin…
Nos ouvrages plongent dans les coulisses de la Love Parade, retracent son évolution année par année, et vous emmènent à la découverte des lieux clés de la scène techno berlinoise.
Guide des lieux historiques de la Techno à Berlin:
(qui vous invite à suivre les anciens tracés de la Parade, à explorer clubs et places mythiques, pour vivre Berlin autrement)
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PAIX, JOIE, CRÊPES: Histoire de la Parade Berlinoise:
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Dr Motte et Walter Puyet (Berlin Techno Narrative) CSD 2019
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" Le Tacheles "
Friedrichstraße 110, 10117 Berlin
L'un des premiers clubs de danse électronique de l'Est était le Ständige Vertretung, situé dans les caves sous l'Art House Tacheles. Ce lieu a été ouvert en février 1990 par un groupe d'Australiens, qui ont déblayé les ruines du sous-sol de l'ancienne « House of Technology » d'AEG, dans ce qui était alors une Zone Autonome Temporaire sur l'Oranienburger Straße, aujourd'hui disparue.
L'Art House Tacheles, nommé d'après une initiative d'artistes, était considéré comme le haut lieu de l'art alternatif à Berlin de 1990 jusqu'à sa fermeture en 2012. Construit entre 1907 et 1909 selon les techniques de construction en béton armé les plus modernes de l'époque, le bâtiment abritait plus de 100 magasins et lieux de divertissement. À partir de 1928, il a été utilisé par AEG comme la « House of Technology ». Après la guerre, le bâtiment, fortement endommagé, n'a été que partiellement réparé.
Dans les années 1970, le cinéma « Camera », géré par la cinémathèque nationale, y a été installé. Les cinéphiles de Berlin-Est pouvaient y découvrir des trésors cinématographiques rarement diffusés dans les cinémas de la RDA. Cependant, le bâtiment s'est progressivement détérioré, et le cinéma « Camera » a déménagé. La démolition du reste du bâtiment était prévue pour 1990.
En février 1990, des squatters ont occupé le bâtiment, empêchant ainsi sa démolition. Dans les années qui ont suivi, le Kunsthaus Tacheles est devenu un symbole de production expérimentale et une institution de la scène culturelle alternative, attirant des activistes du monde entier. Les murs extérieurs étaient ornés de fresques monumentales, la cour abritait des jardins de sculptures en acier, et les escaliers et couloirs étaient couverts de graffitis, d'affiches et d'autocollants. Des spectacles et des expositions d'artistes de différentes nationalités y étaient organisés, avec des groupes comme Spiral Tribe et Mutoid Waste Company.
Le bâtiment abritait une trentaine de studios, des espaces d'exposition pour l'art contemporain, un cinéma, des bars, un club et de grandes salles pour des représentations théâtrales. Pour accéder au club, il fallait emprunter une porte et descendre un escalier parmi les décombres. Les danseurs, habillés de manière extravagante selon un code vestimentaire spécifique à chaque soirée, ne portaient ni talons compensés ni gilets réfléchissants. Ce club est devenu le lieu incontournable de l'Est. Des DJ comme Dr. Motte et d'autres figures de la scène berlinoise, alors peu connus hors de Berlin, s'y sont succédé aux platines.
Les exploitants du club puisaient l'électricité dans le bâtiment voisin. Quelques vieilles télévisions clignotaient, et il y avait peu de places pour s'asseoir, la majorité de l'espace étant réservée à la piste de danse.
Cependant, le bâtiment, avec son terrain de 1 250 m² et sa situation centrale, a suscité la convoitise des investisseurs. Il a été vendu pour un peu moins de 3 millions de marks en 1998. Les artistes, organisés en association, ont réussi à signer un bail de dix ans avec le nouveau propriétaire, jusqu'au 31 décembre 2008, préservant ainsi ce trésor berlinois pour un temps.
N'ayant pas réussi à s'entendre avec le propriétaire sur une prolongation du contrat, les artistes ont de nouveau squatté et géré le bâtiment au cours des années suivantes. En septembre 2012, les occupants ont finalement été expulsés, et le lieu a été fermé au milieu des protestations.
Aujourd'hui, le bâtiment a été rénové et abrite désormais divers immeubles comprenant des bureaux, des logements et des studios d'artistes.
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Nous sommes en 2019, l'exposition Nineties Berlin propose une salle spéciale « 30 ans de la Love Parade » pour commémorer la création de la Love Parade.
Retrouvez l'Histoire de la Love Parade dans le livre PAIX, JOIE, CRÊPES
Cette même année à la Christopher Street Day parade, Dr Motte propose un char anniversaire. Les deux actions eurent un fort succès.
Le 1er Janvier 2020, lors d’une conférence de presse, Dr Motte annonce le retour de l'esprit de la Love Parade, sous le projet Rave The Planet. Ce n'est pas un revival, mais une nouvelle aventure, un prolongement de l'esprit !
(Love Parade est une marque déposée, appartenant à Mc Fit depuis 2006 et ne peut donc être utilisée.)
Ce projet ne veut pas seulement le retour d'une parade, mais un ensemble de travail pour défendre les valeurs de la musique électronique et faire reconnaître la Techno Berlinoise comme Patrimoine Mondial de l'Unesco.
Berlin Techno Narrative suit Rave The Planet depuis le début et est supporter et partenaire officiel de Rave The Planet.
Dr Motte, père de la Love Parade, nous parlait du projet en interview dans notre émission sur Maxximum en Février 2021 :
Rave The Planet a réussi à faire reconnaître la Techno comme Patrimoine Immatériel de l'Unesco le 13 Mars 2024 !
Retrouvez l'Histoire de ce projet également dans notre livre :
Berlin Techno Narrative est présent à chaque parades Rave The Planet pour couvrir en Photos et Vidéos ainsi que sur les réseaux sociaux.(Facebook et Instagram)
La Parade Rave The Planet est plus qu'une parade, c'est une manifestive pour les cultures électroniques avec différentes revendications. Elle est l'occasion de retrouver l'ensemble du spectre des musiques électroniques et différents collectifs, djs dans la House, Techno, Trance, Hardcore puis l'ensemble des dérivés.
Interview Ellen Dosch-Roeingh de Rave The Planet
Rave The Planet 09 Juillet 2022
Rave The Planet 8 Juillet 2023
Rave The Planet 17 Août 2024
Prochaine parade le 12 Juillet 2025 !
Plus d'infos : Rave The Planet 2025
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Raw
Revaler Strasse 99, 10245 Berlin
Le site, anciennement des ateliers ferroviaires, offre une variété d'installations culturelles et sportives, notamment des ateliers d'artistes, des salles de concert et des clubs (Cassiopeia, Astra, Lokschuppen, Der Weiße Hase, Urban Spree, Maaya), des espaces culturels alternatifs (Zum schmutzigen Hobby, Emmapea, Crack Bellmer), des galeries (RAW ART, Kunstakademie Friedrichshain, Urban Spree), une salle de skate, un espace d'escalade et des espaces gastronomiques.
Le club Cassiopeia, le plus ancien du site, combine underground et mainstream, avec une programmation principalement axée sur le hip-hop et la drum & bass.
La Skatehalle Berlin, unique salle de skate indoor de Berlin, a acquis une renommée mondiale depuis son ouverture en hiver 2004/2005.
Situé sur la Revaler Straße, le RAW est un haut lieu de la culture alternative à Berlin. Une partie du site est actuellement menacée par des projets immobiliers. En été, les Berlinois aiment se retrouver dans le Biergarten du skatepark et celui du Cassiopeia mais également à l'Urban Spree.
Envie de découvrir la plus petite discothèque du monde ? Une Télédisko, installée dans une ancienne cabine téléphonique, vous accueille au cœur du RAW. Chaque dimanche, un marché aux puces y est également organisé.
L'Urban Spree
L'Urban Spree est un havre de paix et de culture en plein cœur de la ville, tenu par des Français. C'est un lieu incontournable de la scène underground berlinoise.
Vous pouvez y visiter une galerie d'art intérieure avec des expositions régulières, ainsi qu'une galerie extérieure sur le mur longeant la Warschauer Straße et les murs de l'Urban Spree, où des graffeurs exposent leurs œuvres.
L'Urban Spree est également une salle de concert accueillant une multitude d'artistes de divers genres musicaux. En été, le « jardin » permet de siroter tranquillement un verre au son de la musique, qu'il s'agisse de groupes live ou de DJs mixant différents styles.
Les vendredis, samedis et dimanches en fin d'après-midi, des collectifs organisent des événements. À une époque, l'équipe du label Aufnahme+Wiedergabe y proposait régulièrement des soirées New Beat, mais la programmation peut parfois surprendre.
Petit creux ? Vous pouvez manger sur place grâce à la présence de petits restaurateurs. Envie d'un tatouage ? Un tatoueur a également son local sur place. Ce lieu est l'endroit underground par excellence où se retrouvent les Berlinois. Il n'est pas rare que certains événements attirent une foule nombreuse. Les prix y sont très abordables et l'ambiance conviviale. Vous pourrez également y croiser des DJs de la scène underground venus se détendre.
Chaque année, l'Urban Spree accueille le Krake Festival, avec un marché aux labels électroniques berlinois, souvent tenu par de grands noms de la scène.
Retrouvez l'Histoire et une description précise du RAW dans le Guide Berlin Techno Narrative
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