Köpenicker Straße 50
Ici si comme pour un autre lieu du site, je parle de l'adresse et pas d'un club, c'est que cette adresse a été l'accueil de différents clubs. Cette ancienne usine avait son adresse sur la grande rue, mais la construction des nombreux immeubles et l'utilisation des bâtiments du fond de la cour on fait créer une rue : Wilhelmine-Gemberg-Weg . Le bâtiment restant se situe au 11 de cette rue.
Köpenicker Straße 50 : d’usine à savon à temple de la fête
Bien avant d’abriter des clubs mythiques comme le Planet ou le Kater Holzig, le terrain du 50 Köpenicker Straße, au bord de la Spree, a connu plus d’un siècle d’histoire industrielle.
En 1871, l’entrepreneur Wilhelm Riedel acquiert ce long terrain au bord de l’eau, déjà doté d’une canalisation, et y installe une grande teinturerie mécanique. L’eau plus douce de la Spree est alors un atout pour les procédés de teinture, et l’évacuation des eaux usées se fait sans polluer le fleuve.
En 1880, un imposant bâtiment de cinq étages est érigé, avec son escalier-tour percé pour accueillir une horloge. Malgré un projet municipal d’ouvrir une promenade sur les berges, Riedel conserve l’usage du site, tout en investissant dans un second terrain à la Mühlenstraße, loué à d’autres industriels.
Parallèlement, le lieu accueille aussi la Bleirohrfabrik Bergmann & Franz, fondée en 1874 sur le site voisin. Spécialisée dans les tuyaux en plomb et les fournitures de canalisation, la société joue un rôle majeur dans la mise en place de l’égout berlinois au XIXᵉ siècle, avant de déménager en 1889.
La teinturerie Riedel fonctionne jusqu’aux années 1930, puis le site est réaffecté après 1945 à des usages de stockage pour le VEB Kombinat Großhandel WtB (Waren des täglichen Bedarfs) sous la RDA. Ce passé industriel, marqué par l’odeur du savon et des teintures, explique le surnom ultérieur de “Seifenfabrik” / usine à savon.
Des quais en fête : voyage dans la mémoire des open-airs berlinois
Une friche industrielle, terrain de liberté
Sur les bords de la Spree, entre ruines industrielles et cité, s’est dessinée une histoire nocturne singulière. En avril 1991, l’usine à savon devenait le Planet, puis bien plus le Kater Holzig, non pas des clubs comme les autres, mais des espaces dénués de trace formelle, gratuits de toute publicité, sombres, puissamment sensoriels.
À proximité, se sont implantés des lieux comme la Rampe et le Lichtpark, incarnant une esthétique du “conscious clubbing” : bois, sable, techno électronique, convivialité, et atmosphère détendue en plein air.
La Rampe : plage, musique et liberté
Ouverte en mai 2015, la Rampe proposait une expérience bohème très “Berlin” : DJs, bois, sable, soleil, palmiers (ou presque), et cette célèbre invitation à la fête spontanée au bord de l’eau .
Ce lieu éphémère jouait pleinement avec l’environnement — idéal pour danser, traîner, faire une pause — tout en pressentant que son avenir resterait fragile face à l’urbanisation galopante. L'entrée ne se faisait pas d'ailleurs par la Köpenickerstrasse mais par la Michaelkirchstrasse aux abords de la Spree et du pont Michaelbrücke.
L'accès au Rampe était encore visible en 2019
Lichtpark : electro et esprit de communauté
Juste à côté de l’ancien Kater Holzig, le Lichtpark offrait une plage festive au bord de la Spree : musique électronique, souvent mélodique, prix abordables, entrée gratuite (sauf événements spéciaux), décor simple mais convivial .
Il a animé les nuits berlinoises jusqu’à sa fermeture en août 2014 .
Kater Holzig : héritier de Bar 25
Après la fermeture du Bar 25 en 2010, ce lieu mythique du contre-paysage berlinois, ses fondateurs ont repris les rênes à l’ancienne usine à savon, inaugurant le Kater Holzig. Il a perpétué un esprit libre, poétique et collectif, et connu un grand succès jusqu’à sa fermeture début 2014 . On vous parle de ce lieu dans notre guide.
Le propriétaire a choisi de le remplacer par des appartements de luxe sur pilotis face à la Spree, symbole d’une gentrification triomphante , la dépollution est estimée à plus de 250 000 € avant de céder la place à des projets immobiliers de luxe.
Éphémère entre béton et mémoire
Ces lieux, friches boisées, beach-clubs électro, raves psychédéliques, formaient un paysage urbain en mouvement, où la fête et la création restaient hors des sentiers balisés. Leur disparition met en lumière une tension croissante entre culture libre et développement urbain, entre liberté artistique et profits immobiliers.
À noté, à proximité se trouvait également l’ancien Kiki Blofeld, un autre bar de plage installé sur le toit de la cale à bateaux.
Pour revivre l’histoire de ces espaces ; Rampe, Lichtpark, Kater Holzig, Planet et tous les autres fantômes nocturnes — et comprendre l’éphémérité volontaire qui les caractérise, je vous invite à découvrir mon guide complet. Laissez-vous transporter au cœur d’un Berlin vibratoire, effacé des cartes, mais toujours vivant dans les mémoires.